Famille BOHU : généalogie et histoire
Famille BOHU : généalogie et histoire

Manuscrit contenant une notice sur Oissel et Saint-Etienne-du-Rouvray

La Commission des antiquités de la Seine-Inférieure, lors de sa séance du 5 mai 1836, rapporte que :

 

" M. Rondeaux offre à la Commission la copie d'un manuscrit de M. Rondeaux de Sétry, son grand-père, contenant  une notice sur Oissel et Saint-Étienne-du-Rouvray."

 

Source : Bulletin de la Commission des Antiquités de la Seine-Inférieure, Tome I, page 246.

 

Merci aux Archives Départementales de la Seine-Martime de nous avoir founi un fac-simile de ce manuscrit de 12 pages que vous trouverez ci-dessous, ainsi que sa retranscription littérale.

Fac-simile du manuscrit de Mr. Rondeaux de Sétry
Rondeaux de Sétry manuscrit.pdf
Document Adobe Acrobat [8.3 MB]

Transcription littérale du manuscrit

Notes sur Oissel et St Etienne du Rouvray *
* par Mr Rondeaux de Sétry. Lu à l'académie de Rouen vers 1774

 

Tout annonce que le village d'Oissel, quoiqu'encore fort peuplé et un des plus beaux des environs de Rouen, est bien Déchu de son ancienne splendeur et qu'il a du être autre fois un bourg fort étendu, que la gaieté et la commodité de sa situation devaient faire regarder comme un des plus agréables de la Province. Placé à gauche et sur le Bord de la Seine, à une Distance à peu près Egale de Rouen et d'Elbeuf, il s'étend du nord-Est au sud-ouest dans la Longueur d'une Lieue et Demie, sur à peu près une Demie Lieue de Large. au Nord il a la vaste forêt de Rouvray et au Midi est la Seine.
Ce que nous apprenons de plus ancien dans l'histoire est que les Normands " au milieu du 9e siècle, conduits par Hasting et ayant à leur Tête Bier leur Prince et fils du Roi de Dannemarc, après avoir brulé la ville de Rouen, se fortifièrent dans l'Ile de Oissel, vis-à-vis du Bourg du même nom, qu'ils en firent comme leur place d'armes et y demeurèrent jusqu'à ce qu'ils en furent chassés par une flotte de leurs compatriotes avec qui Charles Le Chauve avait traité pour cela. "
Le Concile de Oissel, tenu sous notre Duc Guillaume le Conquérant, au sujet du différent de l'archevêque de Rouen avec l'abbé de fontenelle, nous fait voir encore qu'en 1082, il fallait que ce fut un endroit considérable. Notre Duc y était alors avec un nombre de Prélats et de seigneurs, soit qu'il y eut une maison de plaisance ou qu'il fut logé dans une communauté de St Wandrille qui y étaitEtablie, si nous en croyons une ancienne tradition de saintWandrille et dont l'Emplacement qui appartient à Mr Dambourney conserve encore le nom. Il ne se retrouve plus rien del'Egliseni desBatimentsanciens. mais on a découvert en cet Endroit un cimetière où j'ai fait ouvrir moi-même un grand nombre de Tombeaux. Ils contenaient tous des ossements et des squelettes très entiers dont on reconnaissait parfaitement la situation ; Ils on les Pieds au Levant, les mains croisées sur la Poitrine et un gros caillou sous la Tête. Du reste ces coffres ou cercueils d'un plâtre extraordinairement grossier et qui n'était qu'à demi battu étaient sans couverture et il parait seulement qu'on avait mis sur les corps de gros cailloux ou des morceaux de grandes briques à rebords dont je n'ai vu nulle part ailleurs, si ce n'est à côté d'un tombeau beaucoup plus ancien que ceux-ci que l'on a découvert l'année dernière dans la forêt de Rouvrai, vis-à-vis de nos paroisses et auprès duquel était un Pot de grès rempli d'ancienne Médailles de Trajan, de Vespasien et de Faustine.
Ces Tombeaux qui contenaient quelques fois un et quelques fois deux corps, étaient en outre remplis d'ossements jettés pêle Mêle avec la Terre, comme nos fossoyeurs ont coutume de faire quand ils remplissent les fosses. Ce qui fait voir qu'on a inhumé autrefois en cet endroit un grand nombre de corps et que cen'étaitpas la sépulture d'une simple communauté. Il y a des os de toutes les tailles et on y a même trouvé en partie sous les restes des fondations d'un vieux mur le squelette d'un Enfant très petit.
Trois autres cimetières également remplis d'ossements et de cercueils de plâtre et qui se trouvent à côté de ce qui est devenu depuis ou la glebe ou le Manoir d'autant de fiefs différents situés dans la même Paroisse , trop anciens et trop considérables pour avoir pu être les sépultures de quelques familles Calvinistes dont les Titres de nos chartriers nous auraient conservé les noms ; nous font juger qu'il y a eu autrefois en cet Endroit plusieurs paroisses ou communautés ; que dans la suite ce que composait l'arrondissement de chacune aura Pu être érigé en fief, et qu'Enfin les PrincipauxBatimentss'étant trouvés auprès de ces Eglises, seront devenus les Manoirs de ces nouveaux seigneurs ou la glèbe de ces fiefs lors de leur Erection.
Deux de ces cimetières sont dans le gros de la Paroisse et peu éloignés même del'Egliseactuellement subsistante ; mais le Troisième en est à près d'une demi lieue en remontant la Seine, sur la pente de la Montagne, au dessous des vestiges d'un vieux château. Ce château ou plutôt cette Tour avait quarante ou quarante cinq pieds de Diamètre,étaitentourée de Larges fossés qui subsistent encore, à fait donner au fief sur lequel elle était batie le nom de fief de Catelier. au dessous se voient les ruines d'un vieux colombier qui a du être accompagné d'autres Batiments dont il ne reste plus rien, et à côté duquel vers le sud-ouest, se trouvent à peu de profondeur une grande quantité d'ossements et de tombeaux tous semblables à ceux ces Deux cimetières précédents. On pourra dire peut être que c'est que l'on avait enterré là Les corps de ceux qui avaient été tués dans les temps de la guerre, en attaquant ou en défendant le chateau qui était au dessus ; Mais le soin avec lequel ces corps ont été placés dans des cercueils de Plâtre faits exprès, annonce bien plus de cérémonie qu'on n'en fait ordinairement dans ces occasions , où l'on se contente de les Entasser pêle mêle dans des Trous que souvent le hazard presente.. L'on ne peut donc gueres à mon gré , se dispenser de reconnaitre qu'il y a eu en cet endroit un cimetière qui aurait été celui de quelque Eglise ou de quelque chapelle bien convenablement placée pour être une succursale à portée d'un hameau très considérable et très écarté que l'on appelle les Roches.
Au reste si ces conjectures nous font penser que Oissel a du être autrefois très étendu et très peuplé, ce qui reste des beaux et longs Taluts de pierre de Taille qui bordaient ses quais avec des avances de place en place, dans l'Etendue de plus d'un quart de Lieue, nous prouve que son port a du être aussi très considérable. Tous les Batteaux qui montaient à Paris s'y arrêtaient ; les chevaux qui tiraient ces Batteaux, et les hommes de l'Equipage y couchaient. Il y avait pour eux plusieurs auberges ; et ce n'est que de nos jours qu'en doublant le nombre des chevaux , c'est ce qu'on appelle aller à Double Run, les voituriers ont cessé de s'y arrêter. D'ailleurs une Plage d'un gravier Egalement Doux et ferme offre dans une grande Partie de ces Quais des places commodes pour mettre en chantier ces Immenses Batteaux plats qui transportent à paris les sels, les Bois d'une partie de nos forêts et les Marchandises sans nombre dont Rouen a toujours été l'Entrepôt. Je ne doute pas même que dans les temps ou la forêt de Rouvrai était remplie des plus beaux bois et et qu'elle couvrait une grande Partie des Terres de Oissel et surtout de StEtienne,ce ne fut en cet endroitou Etaient les Principaux chantiers pour la construction de ces sortes de Batteaux ; et comme l'on voit certaines paroisses se perpétuer de siècle en siècle dans l'usage de Travailler certains ouvrages ; celle de Tourville qui est vis-à-vis de Oissel de l'autre côté de la Seine fournit toujours un très grand nombre de de charpentiers de Batteaux, d'hommes pour les conduire et de chevaux pour le halage que la grande quantité de foins, qu'elle produit, détermine ses habitants à entretenir ; Tandis que ceux de Oissel persistantdansle genre d'occupation du petit peuple et des Bourgs ont conservé un esprit de Trafic et beaucoup de gout pour la vie sédentaire et le Travail des Manufactures.
Une belle place parfaitement quârrée appelée présentement le Plein du Bout de la Ville était selon la tradition l'Endroitou se tenaient les Marchés. Il y avait dit-on des halles dont il ne reste plus aucuns vestiges ; mais une place aussi régulière ferait honneur à bien des villes.
Quant à l'Ile de Oissel, il est actuellement assez difficile de déterminerprécisément quelle est celle dont nos anciens historiens ont voulu parler. Il y en a une grande assez éloignée de la terre ferme et vis-à-vis de l'Extrémité de de la paroisse vers le port St Ouën qui porte depuis longtemps le nom des fermiers qui la cultivent et y habitent et ou se trouvent les fondations de quelques Edifices ; un vieillard du pays qui était propriétaire d'une petite Partie de cette île m'a même assuré souvent qu'iltenaitde ses Pères que c'était là la véritable et ancienne île de Oissel, mais aucuns Titre n'appuient ce qu'il avançait, et quoiqu'on ne remarque plus aucunes Traces de Batiments ni de fortifications, dans une autre moins grande qui est vis-à-vis de l'Eglise et séparée seulement de la terre ferme par un Bras d'eau assez Etroit. Tout concourt à faire regarder cette seconde comme celle qui était nécessairement dépendante due ce Bourg et à la quelle on a du en donner le nom. Sa situation vis-à-vis du milieu de la paroisse, sa proximité et le nom même d'Ile de St Martin patron de l'Eglise d'Oissel qui subsiste de nos Jours et qu'elle a toujours porté semblent devoir déterminer.
Quoiqu'un vieux chateau nommé communément Le chateau Foüet et situé sur le Bord d'une Roche, le long de la Seine, soit éloigné d'une Lieue, et hors des Limites de la Paroisse dont J'essaie de donner l'histoire et la description et qu'il soit sur les confins de celle d'Orival ; Je crois en devoir dire quelque chose tant parcequ'il est très voisin que parcequ'il ne mériterait pas une Description particulière. Les Paysants de ces cantons en content des Merveilles comme ils font ordinairement de ces sortes d'Endroits ; Ils en vantent surtout les souterrains ; mais ayant cherché avec le plus grand soin l'Entrée de quelqu'un de ceux qu'ils m'avaient assuré qu'il devait y avoir autour du chateau et ou leurs Pères avaient encore vu disaient-ils de fortes portes de fer. Je n'ai Jamais trouvé qu'une large crevasse entre deux roches vers le Bas de la falaise au haut de laquelle sont les ruines du chateau qui devait n'avoir que bien peu d'Etendue, et dont nos historiens ne font aucune Mention. Cette fente s'étend 50 ou 60 Pas et est dans le fond remplie de noms en Ecriture gothique gravés sur la pierre. Ces noms selon la Tradition sont ceux de Quantité de personnes qui se cachèrent en cet Endroit dans le temps des guerres civiles.
La situation du chateau Fouët, me mène assez naturellement à parler des Roches qui bordent, à une Légère distance, la rivière de Seine du coté du nord, tant à Orival qu'aux environs et dont une Etendue de plus d'une Demie lieue se trouve sur Oissel. Ces Rochers Enormes qui commencent à ne montrer en cet endroit que des précipices horribles, forment le contraste le plus frappant avec l'autre Bout de cette paroisse, qui est un Pays plat, ouvert et sablonneux, tandis que les Terres s'élevant insensiblement, celui-ci devient le pays le plus rude et le plus sauvage qu'on puisse Imaginer. La plupart des Maisons n'y sont que des Trous creusés dans la Roche ou l'on ne parvient que par des sentiers formés en zigzags comme on nous représente ceux des hermitages des Déserts et dont les Environs sont Noircis par la fumée que les petites cheminées qui sont toujours percées dans la devanture laissent Echapper le long de la falaise. D'autres Trous, moins Profonds et garnis d'Echaffaudages et de claies, à différents Etages présentent encore un aspect assez Bizarre, mais font des sècheries très avantageuses pour les noix qui assez naturellement Blanches dans le Terrain, le deviennent encore beaucoup plus par les soins qu'on prend de les bien Laver à la rivière et de les faire sècher promptement sur ces claies. Les Immenses Noyers qui les Oroduisent offusquent le peu d'Espace qui reste entre les Roches et la Rivière, et la rudesse d'une telle situation semble même Influer sur l'humeur de ceux qui y habitent. Ces Endroits cependant ont des agréments à certains Egards et sont même plus Intéressants à Parcourir que bien d'autres, pour des curieux et des Naturalistes. Il se trouve sur ces roches une Quantité de plantes médicinales et j'y en ai trouvé d'assez rares comme le Nidus avis, les plus jolis Orchis, des Amelanchiers sans nombre, la Rhüe et quelques plantes de garance.
J'apportai chez moi ces dernières pour les y cultiver et quoi qu'elles ne semblent faire qu'une très Légère variété de la garance dont on a tiré la graine de Hollande ; un des Membres de cette académie aussi curieux artiste qu'il nous a prouvé qu'il était bon orateur a su en tirer un rouge bien plus beau qu'il ne faisait de celle de Hollande et au moins Equivalent à celui de la garance de Smirne. C'est à Oissel même qu'il a fait d'abord en petit ses utiles Essais et ou il commence à cultiver jusque dans la campagne une Plante, dont la sagacité lui fait découvrir et constater de plus en plus les Propriétés.
Au reste si les arides sommets de nos Roches offrent aux Botanistes une ample Moisson de plantes utiles, la coupe ne nous en présente pas moins d'objets Intéressants pour un Naturaliste et un Physicien. Ces Montagnes composées de couches ou de Lits d'une pierre dure et d'un grain fort Inégal, alternativement avec des Lits d'une pierre un peu plus tendre, qui se calcine à l'air et dont la salure attire une Multitude de Pigeons, nous démontrent par la quantité prodigieuse de coquillages marins entiers ou en Menus fragments, qu'elles contiennent et qui semblent pêtris dans leur substance, qu'elles ont été nécessairement formées par les sédiments des eaux de la mer qui surpassaient alors la hauteur des Montagnes les plus élevées et dont les courants différents ont creusé les vallons ou les enfoncements qui partagent ces amas énormes.
J'y ai trouvé une Quantité Etonnante de ces beaux oursins de la mer rouge qui décorent souvent les cabinets des curieux lorsqu'ils sont Entiers et bien conservés, mais ceux-ci sont brisés pour la plupart ; il y a des Peignes, des Tellines de grandes huitres et des oursins de nos mers ; mais un surtout en se cassant en Deux quand je voulus le Détacher de la Pierre, me fit un singulier Plaisir et ne se Brisat qu'autant qu'il le fallait pour me montrer qu'il était en dedans composé à moitié de Jolis cristaux d'un Blanc Tirant sur le citron et à moitié d'un Bizet Noir et fort dur qui n'avaient pu s'allier Ensemble.
Quelques carrières d'une Pierre très Blanche, extrêmement tendre, beaucoup plus égale dans sa substance que celles dont nous venons de Parler, qui n'est à bien dire qu'une Espèce de craie qui se Durcit à l'air au point de devenir quand elle est bien mise sur ses Lits , passablement bonne pour Batir, se trouvent en différents endroits et font vivre quelques uns des habitants de ces Tristes Lieux. Souvent même en Tirant leur Pierre Ils trouvent le moyen de se fabriquer des Maisons également à l'abri du grand chaud, du grand froid et des pluies les plus violentes.
Une de ces habitations cependant s'est trouvée exposée à un accident assez singulier. Il y avait une feslure à son solide platfond par ou on n'avait jamais vu couler d'Eau, Tout d'un coup dans un beau jour on en vit en tomber par cette fente une Quantité considérable dont la maison fut inondée. Elle cesa de couler après un certain temps ; mais cet Endroit ayant continué depuis à donner de l'eau régulièrement deux ou Trois jours après les pluies, il a fallu faire construire une goutière de bois qui Traversat la Maison pour d'en débarasser et la Porter au dehors. Cette eau sans doute s'était ouvert peu à peu un passage qui avait été fermé jusqu'alors et ne parvient à à cette Issüe qu'après s'être filtrée à Travers des Terres qui l'arretent un certain temps.
C'est au pied de ces Roches et sur les coteaux qui les avoisines que croissent les petits pois les plus avancés que nous voyons à Rouen, les Bonnes noix semblables à celles d'Orival et des pommes qui font un cidre Délicat qu'on porte souvent à Paris.
La Terre qui est au dessus des Montagnes est argileuse, propre au Bleds et au plant et se cultive en deux saisons comme Toutes celles de cette nature, mais en se rapprochant du Milieu de la paroisse l'argille commençant à se mêler avec le sable forme une Terre également substancieuse et légère, qui rapporte tous les ans les plus belles récoltes de toutes Espèces et entre autres de la gaude qu'on vend quelquefois fort cher aux Teinturiers et dont on transporte beaucoup en hollande. C'est en conséquence de cette fécondité que ces fonds se louent dans un petit canton 40 ou 50 Fr l'acre. Elles deviennent graveleuses ensuite en allant vers le Levant et en s'éloignant au delà de l'Eglise on ne trouve bientôt plus que des sables qui avec un air d'aridité ne laissent pourtant pas de rapporter tous les ans et quelque fois deux récoltes .
Il faut à la vérité beaucoup d'engrais et de Travail, le fumier, les raclures de corne des Tourneurs, les Tontures Inutiles des Draperies, la fiente de pigeon, tout cela fait pour ces Terres Légères des améliorations peu durables mais propres à aider promptement la végétation et les fait rapporter quelquefois abondamment des pois, des haricots, des bleds de Mars, des seigles, des orges, du bled sarrasin et après la plus part de ces récoltes une seconde de gros Navets qu'on sème jusqu'à la fin d'août, et qui sont la ressource la plus assurée pour la Nourriture des Bestiaux. Ils procurent aux vaches une abondance de lait qui met les habitants de ces villages en Etat d'Elever beaucoup de ces veaux gras et Délicats qu'on appelle communément veaux de Rivière parce que ce n'est guère que le long de la Seine qu'on réussit à leur donner cette Blancheur et cette finesse qui les fait tant estimer.
Vers l'Extrémité de cette paroisse les Terrains bas qui sont à peu près vis-à-vis le port St Oüen offrent une nature de sol Mitoyenne entre la Terre de Marais et les sables graveleux et pleins de cailloux qui sont audessus, c'est un Mélange que la charrue fait depuis long temps de ce fond stérile avec les vases et le Limon qu'y déposent toujours les eaux de la Seine qui couvrent ces Endroits dans les Débordements. Ce canton, Nommé les Matureaux, est extrêmement sujet aux chardons et demande une bonne culture ; mais il est d'ailleurs d'une fécondité admirable pour les orges, les Lusernes, et les Navets. Le trèfle et le sain foin y réussiraient également s'ils ne périssaient pas sous l'eau qui comme nous venons de le dire couvre souvent ce Terrain.
Le Traité de la culture des Terres de Mr Patullo qui propose d'améliorer les sables par le Mélange de glaises qui selon lui se trouvent presque toujours au dessous de ces premiers à une assez Légère profondeur, nous déterminera à sonder avec des Tarières de 8 ou dix pieds de Longueur pour tacher de parvenir à nous procurer ce moyen d'amélioration, qui étant propre à donner du corps à nos terres, semblerait devoir en corriger le vice radical ; nos recherches furent Inutiles à cet Egard et ne servirent qu'à nous assurer qu'il n'y a au dessous de ces sables qu'un tuf ou cailloutis d'une dureté considérable dessous duquel on trouve de Mauvaise pierre, et en quelques Endroits de la Marne dont on commence à faire des Essais dans les fonds argilleux de cette paroisse. Ces sondes procurèrent à Mr Dambourney qui s'y Livra particulièrement, l'occasion de remarquer que proches la mare du puits, dans la Forêt à environ une demie Lieue au Nord-Oüest de Oissel se trouve une Terre Ferrugineuse et tellement remplie de vitriol qu'il fit en Mêlant de cette Terre avec une Infusion de noix de galle une Encre passablement Noire avec laquelle il m'Ecrivit sur le champ. Voilà où se bornèrent les Découvertes que nous firent faire à Oissel ces Unstruments.Passons Maintenant à l'histoire de la seconde Paroisse dont J'essaie de donner ici l'histoire.
Saint Etienne du Rouvray au Nord Est de Oissel dont il est à peu près également éloigné que de Rouen est aussi dans une situation très riante, mais n'a pas comme cette dernière paroisse l'agrément et la commodité de la Rivière - au Levant le long de la Seine sont de vastes et fertiles prairies et au Couchant le Terrain s'élevant insensiblement n'offre que des Landes qui servent de communes à cette paroisse et sur les quelles les Bouchers de la ville de Rouen ont aussi le Droit de faire paturer leurs Bestiaux ; ce village étant encore dans l'Enclave de la Banlieue qui finit immédiatement à l'Extrémité des Maisons ou se trouve la Croix qui en fait la Borne.
Le voisinage de la forêt de Rouvray qui Descendait autrefois du côté de Rouen jusqu'à la prairie et qui serrait partout ailleurs les Maisons de forts près fit appeler cette paroisse St Etienne jouxte Rouvrai. C'était dans cette forêt voisine de leur capitale que nos Ducs ne [se?] plaisaient le plus souvent à chasser et il y a Encore vis-à-vis de St Etienne une Mare nommée la Mare au Duc, qui Etait dit on leur rendez vous ordinaire. Quoiqu'actuellement les Bois de cette forêt soient très faibles et soient même dépéris au point qu'il a fallu y repasser la charrue pour replanter de nouveau toute la Partie qui porte le nom de Rouvray, notre vieille chronique nous en parle comme d'une forêt qui était également vaste et couverte, et c'est même là où comme dans un fort impénétrable nos anciens historiens ont dit que se retirait dans un temps bien plus Eloigné, la Gargouille ce Dragon fabuleux qui n'est probablement que le symbole du Débordement des Eaux de la Seine qu'on crut prête à Engloutir la ville de Rouen et dont on attribua la retraite aux prières Efficaces de St Romain. Mais quelque chose d'Infiniment plus sur est la Quantité étonnante de charbonnières dont on a encore remarqué les vestiges lorsqu'on y a Labouré et qui prouvent combien cette forêt a du autrefois être remplie de Bois. Presque toutes les Terres qui sont entre St Etienne et Quatremares en faisaient alors partie et le chemin de Rouen passait même à une des Extrémités.
Ce chemin qui dans ces temps était celui de Paris quand on prenait la route de Bas par le pont de L'arche et Vernon ; c'était aussi celui que prenaient ordinairement nos Rois quand ils faisaient leurs Entrées dans notre ville pour y arriver avec plus de Majesté en passant par dessus le pont. Le Bas des Côtes St Adrien et de Belbeuf était alors Impraticables, il n'y avait de ce côté qu'un halage difficile pour les batteaux et c'était au Port St Ouën qu'on traversait la rivière. Il y avait un Bac pour les voitures qui prenaient Ensuite suivant la saison ou le chemin qui passe derrière le chœurde l'Eglise de St Etienne et ensuite à Travers un coin de la Forêt ou un autre qui ne sert plus actuellement que pour charrier Les Foins dans le temps de la Récolte et qui est connu sous le nom de Verte Voie, parcequ'il va toujours au Milieu des Prés par les Endroits les plus élevés et ne se réunit à l'autre qu'à l'Entrée du village de Sotteville. C'est Presque de nos Jours, quand on a fait passer au pied des côtes de la Mivoie le grand chemin de Paris, qu'on a Mis du côté de St Etienne Le hâlage qui était auparavant de l'autre à la place duquel on a transporté une Partie des Oserais Immenses qui étaient sur notre rivage.
Au reste Il ne parait pas que St Etienne ait été anciennement bien considérable et l'on peut dire qu'il est actuellement plus peuplé et plus riche qu'il n'a jamais été, son Eglise même semble faire foi de cette augmentation. Le chœur qui en est très ancien est extraordinairement bas et petit comme il convenait à l'Etat où Etait Lors qu'il fut construit. Cette Paroisse, Tandis que la Nef qui est beaucoup plus plus Moderne quoique belle et grande suffit à peine à Présent pour contenir le nombre de ses paroissiens qui augmente tous les Jours. Ce n'est pourtant pas qu'il vienne beaucoup d'Etrangers s'établir dans ce village, ils y sont mal accueillis ; mais le genre de Travail auquel les hommes se sont adonnés en les éloignant de chez eux pendant plusieurs mois de l'année pour aller paver en grés dans différentes provinces, Tandis que les femmes, laborieuses restent chargées de tout le Travail de la campagne, leur procure cette aisance qui resserrée dans de Justes bornes est la source certaine d'une heureuse Population.
Une tradition qui parait être fondée nous apprend qu'il y a eu autrefois dans cette paroisse une Maison de Templiers et qu'ils y avaient aussi un Petit fief qui porte le nom de St Etienne ainsi que deux autres absolument indépendants et relevants également du Roi qui appartiennent actuellement tous trois à des seigneurs différents. Cette Maison et le fief qu'ils y possédaient passèrent après l'extinction de l'Ordre des Templiers à l'abbaie de St Wandrille et elle les a possédés jusqu'à la fin du 16e siècle ou le clergé et les religieux furent authorisés à aliéner de leurs fonds pour acquitter leurs dettes et leur part des charges de l'Etat. Longtemps auparavant sans doute les anciens possesseurs y avaient eu leur chapelle et leur cimetière ; aussi a t'on trouvé près de leur enclos, dans un Terrain qui était il n'y a pas plus d'un siècle une Place vague et ou un nommé Maximilien Le Tellier aux auteurs duquel elle avait été fieffée, fit creuser pour faire les fondations de quelques Batiments nouveaux, des Tombeaux de platre et des ossements, qui annonçaient que cet Endroit avait anciennement servi de sépulture. D'autres ossements ont encore été trouvés de nos Jours en fouillant dans une cour commune qui je ne sais pourquoi porte le nom singulier de Cour Souveraine et est vis-à-vis de la porte d'Entrée de celle ou nous venons de dire qu'était la Maison des Templiers et après eux des religieux de St Wandrille ; mais comme l'on a trouvé plusieurs fois dans le même Endroit des pièces d'or du temps de françois second, les corps dont on a retrouvé les os et la Monnaie pourraient bien avoir été mis là dans le Même temps qui était celui des Troubles de Religion et des guerres civiles qui commencèrent sous ce Prince et être par conséquent ceux de quelques Calvinistes et bien moins anciens que les autres.
Quant aux vieux Batiments et à la chapelle qu'on a vu subsister jusqu'à ces derniers temps dans la cours des Religieux de St Wandrille, ce ne devait être que celle de Mrs De Pericard qui ont été après eux près de 120 ans propriétaires de cette Terre et dont plusieurs ayant été Evêques et étant venus souvent à St Etienne auront voulu avoir chez eux une chapelle un peu considérable, car Il ne parait pas que les Religieux y aient jamais résidé et qu'ils aient regardé cette Terre autrement que toutes celles dont Ils Jouissent pour en avoir le Revenu.
Voila à peu près à quoi se réduit tout ce que j'ai pu savoir jusqu'Ici des antiquités de ce village qui d'ailleurs est en bonne Partie semblable par l'aridité de son sol à cette Portion de la campagne de Oissel qui l'avoisine et dont nous déjà Marqué quelles étaient la culture et les productions. Je crois seulement devoir observer encore une fois ici que presque toutes les Terres qui sont au dessus du Chemin de Rouen et même jusqu'au chemin du Port St Ouen, ont été autrefoisen bois et que 300 acres qui sont vers Oissel ont été données comme vaines et vagues par Henri IV à un Sr Robert de Hanivel et érigées en fief sous le nom de la Chevalerie. Ces Terres fieffées depuis à un grand nombre de particuliers, ont été peu à peu mises en valeur et font voir ce qu'on pourrait attendre de pareils Défrichements.
Presque tout le reste des fonds qui sont au dessous du chemin de Rouen et vers la rivière, consiste en prairies dont la plupart son très fertiles, et en Terres de Marais qui suffisamment engraissée par le Limon que la Rivière y dépose dans les Débordements rapportent sans être Jamais fumées, de deux années l'une de très beaux bleds et de tout ce que rapportent ordinairement les Terres fortes et un peu glaiseuses. Il est vrai que les Bleds qu'on fait avant l'Hiver sont quelquefois gâtés quand l'eau Déborde et séjourne trop longtemps dessus ; ou qu'il vient de gros vents, des hâles, ou des gelées lorsqu'elles se retirent ; mais sans cet Inconvénient , on pourrait dire que ces fonds bien cultivés seraient des Meilleurs qu'il y eût. Ces Terres qui sont le long de la rivière sont plus élevées que la prairie même et il parait que celle ci n'a été formée que peu à peu par les couches de Limon que les eaux ont déposé à la longue sur un fond ou la Seine a du couler autrefois. Je crois en être assuré par les diférentes couches d'une vase Noirâtre et d'un beau sable de de rivière que j'ai Découvertes à 3 pieds et demi au dessous du niveau de sa surface en faisant creuser un Petit Etang au fond duquel on a Laissé un Lit de glaise extrêmement dure et mêlée de cailloux qui parait avoir été originairement le fond du Lit de cet ancien canal. C'est sans doute au sables purs qui s'étendent au loin sous les Terres qu'on doit attribuer la Bonté de l'eau des puits de ce Pays qui en donnent presque tous d'une Légèreté et d'une douceur parfaite qui n'est autre que celle de la Seine parfaitement filtrée.
De l'autre côté du village, sous les arides communes qui bornent au Couchant toute la Paroisse et même sous une assez grande partie des Terres qui s'élèvent en allant de ce côté, on trouve à différentes profondeurs, mais communément entre 10 12 ou 15 pieds une Pierre très Blanche, qui ne donne que de Médiocres Moilons propres à faire des murs ou des Batiments en pierre vilaine. Cette Pierre est Moyennement dure, pleine de fils et assez sujette à se calciner à la gelée ; mais vis-à-vis de l'Eglise dans le bord de la forêt , il y a des carrières qui donnent dans certains bancs une Pierre Egalement dure et belle et qui n'a d'autre défaut que de fournir rarement de grands morceaux. Une connue sous le nom de Grande Carrière est absolument abandonnée ; l'autre, qu'on appelle la petite , est encore ouverte et on y travaille, surtout les Hivers. Les Bancs supérieurs fournissent des bittes d'une dureté Incroyable, qu'on vient chercher d'assez loin et qu'on emploie à border le parage des grands chemins et à fonder les Digues et les Moulins. Au dessous en vidant les décombres on trouve à 25 ou 30 Pieds sous Terre le Franc Banc, dont la pierre d'un grain plein et parfaitement égal, a , avec beaucoup plus de dureté, la finesse et la couleur de la Pierre avec laquelle on fait des Pavés de Caen. Au reste, Mr D'ambourney et moi avec les des Tarières à Terre dans différents endroits de la forêt, toujours dans l'Intention de Découvrir quelques glaises, nous trouvames au bord d'une Mare Nommée la Mare aux Tuiliers, un sable de la plus grande finesse lié par un peu de la glaise d'un jaune rougeatre en sorte que le tout forme une sorte de pâte qui étant lavée et Mise au sec se vitrifie aisément et pourrait servir , à ce qu'ont Jugé les fayanciers à former la couverte ou l'Email de leurs ouvrages ; mais qui ne contient pas assez de glaise pour se soutenir au feu et pouvoir seule comme eux et nous l'avions espéré, servir à faire des vases d'une Nature approchante de celle de la Terre Blanche d'angleterre.
Quoique dans nos recherches nous ne soyons pas parvenus à trouver de glaises pures, parce que probablement nous n'avons sondé qu'à une trop Légère profondeur, Je ne doute pas que dans certains endroits de la forêt où l'eau parait séjourner et surtout aux environs des Mares qu'on n'a appelé sans doute mare aux Tuiliers et aux Potiers que parce qu'en Effet ces sortes d'ouvriers y auront autrefois trouvé de Terres qui leur convenaient. On ne put en fouillant plus profondément ; La coupe du fossé qui sépare le bois nommé la Haie brout des communes de St Etienne en a déjà indiqué, et la rareté de l'argille ayant Engagé à se servir même de celle qui se présentait d'abord et qui était mêlée de beaucoup de gravier, on a en creusant dans les Environs découvert une glaise extrêmement tenace quoique toujours mêlée d'un peu de sable qui se durcit beaucoup au feu et que les fayanciers de St Sever préfèrent à d'autres pour la construction de leurs fours.
Partout sous la Légère couche de sable que la charrue retourne à un pied au plus de Profondeur est un gravier mêlé de cailloux ou comme on dit communément un Tuf, d'une Dureté qui permet rarement aux Racine d'y pénétrer en sorte qu'elles sont obligées de Trouer presque à fleur de terre ; quelque sujet que l'on ait donc de craindre Les Effets de la chaleur du soleil dans un Terrain aussi brulant, Il ne faut y planter que très peu profondément , et moyennant cela tous les arbres ; mais surtout l'orme, le chêne, le Pommier et le cerisier réussissent à merveille. Ceux qu'on a plantés depuis dans nos cantons peuvent servir à prouver qu'il n'y a point de terre, quand on sait y mettre ce qui convient, dont la culture ne puisse être fort avantageuse,, que souvent il ne faut qu'Essayer pour s'en convaincre et que la paresse et la prévention ont plus de part à l'abandon de certain fonds que l'Expérience d'une stérilité constante.
 
Transcription : Alain AJ BOHU

Actualités

03/01/2023 : le site "alvikistoria" sur WordPress a été fermé par manque de lecteurs, et le lien pour accéder à notre arbre généalogique sur Heredis Online a été mis à jour.

Nombre de visites

Version imprimable | Plan du site
Site hébergé par IONOS